lundi 9 novembre 2020

Le judo au temps du covid

Inauguration en septembre

Bien que nous n'ayons rien publié depuis plusieurs mois, l'activité n'a pas cessé au Judo-club de Perros Guirec. Un nouveau confinement nous empêche de nous retrouver mais chacun à notre manière nous avons la détermination de rester liés à la pratique du judo originel. 
Je ne peux pas citer de façon exacte les paroles de Michel, notre professeur, qui a conclu le dernier cours partagé au dojo Kerabram. Il constatait (je rapporte les propos en substance) que nous vivions une période ou l’autre est vécu comme une menace. Le corps de l’autre est avant tout perçu comme un vecteur potentiel de maladie, le confinement est un état de fait qui tend à nous isoler les uns des autres. Le confinement tend aussi à accroître les tendances au repliement, à l’agressivité. Or le judo originel est une pratique qui nous conduit à adopter des attitudes et des réflexes qui sont aux antipodes de ces tendances. 
 Michel a aussi rappelé que nous ne sommes pas que des corps, mais que nous sommes aussi esprit et pensée. Et que le judo, jouant à l’intersection de ces composantes, nous appelle à les réunir, nous appelant à être. C’est parce que le judo a cette faculté qu’il nous permet de continuer alors même que les salles sont fermées. Nous continuons en pensée, nous continuons par des exercices individuels qui nous rappellent les sensations que nous font éprouver tel mouvement, tel kata. Nous continuons en cherchant la non opposition et donc le relâchement. 
M. Correa, à l'origine de la
FIAJ

Quoi de plus utile dans un monde où l’on apprend surtout à s’opposer ? Et pour rappel, la non-opposition (sans doute le terme qui conviendrait le mieux pour traduire le « ju » de judo qu’on traduit habituellement par « souplesse ») n’a rien à voir avec la résignation : « … résister à un adversaire plus fort que vous, écrivait Kano, ne fait que précipiter votre défaite, alors que s’adapter ou esquiver l’attaque de l’adversaire dans un déséquilibre qui lui fait perdre de sa puissance et vous pouvez le vaincre ». Accepter n’est pas abdiquer. 
Nous n’avons pas abandonné l’idée du judo au temps du confinement : les membres de la FIAJ se sont retrouvés sur zoom et ont échangé à propos leurs pratiques. Après le déconfinement des rencontres amicales ont eu lieu, les judokas volontaires ont consolidé leur pratique dans des dojos privés, les événements autorisés ont eu lieu : le séminaire des ceintures noires du dernier week end d’août notamment. Nous avons pu reprendre la pratique, avec le soutien bienveillant de la mairie, et inaugurer officiellement le dojo de Kerabram. 
Les enfants sont revenus, aussi nombreux que l’année précédente ; les cours ont repris avec leurs horaires habituels (voir ci-contre), plus un cours du samedi assuré par Michel ou l’un des professeurs de la fédération (Didier, Philippe…). 
Le judo, tel qu’il se pratique dans notre club, est une éducation qui vaut pour la vie. Qui veut n’en faire qu’une « activité » comme une autre peut le faire, qui veut y chercher un surcroît d’humanité, dans un monde où l’on se désoriente plus facilement qu’on ne s’y retrouve, peut aussi le faire.
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mercredi 22 janvier 2020

Koshiki no kata à la cérémonie des voeux 2020

La cérémonie des vœux a dessiné pour nous cette année l’horizon d’une montagne : la montagne du Koshiki no kata, ce kata étrange qui semble issu d’un autre âge.

L'entraînement avant la pratique collective
Dans Junomichi, l’origine du judo (1), le lexique final explique ainsi la dynamique du kata : « Ce kata offre l’image d’un combat entre deux samouraï au bord d’une falaise. Les deux combattants portent une armure qui les contraint à un déplacement lent et maîtrisé. A chaque attaque, l’assaillant tente de jeter l’autre dans le précipice. Le samouraï attaqué esquive, contrôle l’attaque et amène son assaillant jusqu’au bord de la falaise où il lui laisse la possibilité d’échapper à la chute fatale. Attaque après attaque, le danger s’accentue, jusqu’à la dernière technique, à l’issue de laquelle l’attaquant est projeté du haut de la falaise » Si le scénario rappelle la finale de « La Légende du grand Judo » (2), sa réalisation manifeste indéniablement une maîtrise de notre art qui n’est pas à la portée de tous.
Mâitre Kano et Yamashita exécutant le Koshiki.

Nous avons donc cherché à grimper, selon les mots de Michel – je dirais plus modestement « à entrevoir »  - les pentes du Koshiki puis à redescendre par pallier (en empruntant les techniques du Katame-no, du Jû no kata et du Nage-no). La cérémonie des vœux aura été une fois de plus un formidable moment d’échanges, de rencontres, d’amitié (sur et hors tatami) et sans doute aussi de résolution. Dessinée par M. Correa, comme le point de départ de notre année de judo, elle est l’occasion de se figurer un horizon dans la pratique. Pour beaucoup d’entre nous la montagne du Koshiki est loin, l’essentiel est sans doute de ne pas la perdre de vue.

Les judokas de Perros Guirec à Sablé sur Sarthe


(1) Igor Correa, Loïc Le Hanneur, Rudolf Di Stefano, Laurent Bruel, Junomichi, L'origine du judo, Budo éditions, 2010.
(2) Akira Kourosawa, La Légende du grand judoARTE ÉDITIONS, 2011.